Salut les gens!
Voici le chapitre 7, après quelques péripéties. Je suis en vacances, officiellement, donc, je devrais (mais ceci reste un conditionnel) pouvoir poster plus souvent, même si je déclare forfait en ce qui concerne les publications de Nigthmare ^^.
Euhm, sincèrement, c'est un chapitre qui n'est pas passionnant, mais il y en a partout, j'imagine. Il est nécessaire car c'est le tournant de la fic. Et oui, l'heure des révélations (qui ne sont pas vraiment des révélations pour nous mais qui le sont pour les personnages), a (presque) sonnée. Très important, donc. Seulement voilà, il ne s'y passe pas grand chose de concret.
J'espère que vous l'apprécierez malgré le manque évident d'action.
Sur ce, bonne lecture!
LA CHIMÈRE
Chapitre 7: Himes et Infiltration
Shizuru entra dans la pièce où Lilie Aldean l'attendait depuis une dizaine de minutes. Elle s'était mise d'accord avec Nao sur le fait qu'interroger la jeune femme en premier leur ferait gagner un temps précieux, car elle était de loin la plus fragile des deux scientifiques. Cette dernière, droite et apparemment sereine, était assise sur une petite chaise inconfortable et reliée par plusieurs capteurs à une machine sur l'écran de laquelle les battements de coeur et un gros plan de son oeil étaient retransmis. La pièce était sombre. Inquiétante. Silencieuse.
Shizuru avança en silence et s'assit à son tour sur un siège plus confortable avec élégance. Juste en face de l'écran de contrôle. Elle croisa les jambes avec grâce et appuya nonchalamment ses bras sur les accoudoirs en souriant.
« Bien », commença-t-elle d'une voix neutre, « Je vais vous poser plusieurs questions auxquelles vous devrez répondre par oui ou par non. » Elle attendit un moment que la jeune femme hoche la tête avant de poursuivre. « Si les battements de votre coeur deviennent irréguliers ou si la pupille de votre oeil se dilate, je considérerai que vous mentez. »
Lilie Aldean déglutit péniblement et ferma les yeux un instant pour calmer un apparent début de panique. Elle expira lentement et les rouvrit, le regard indéchiffrable. « Allons-y. »
Shizuru reporta son attention sur l'écran et posa la première de ses questions. Si tout se passait comme prévu et qu'elle avait vu juste l'interrogatoire ne devait pas prendre plus de quelques minutes. « Vous vous appelez Lilie Aldean. »
« Oui »
« Vrai. Vous travaillez pour la fondation Searrs. »
« Oui »
L'interrogatoire continua pendant un moment sans qu'aucun mensonge ne soit dévoilé. Shizuru commença même à s'inquiéter. Son instinct l'aurait trompé? Sans se départir de son calme ni de son masque de froide détermination, elle posa sans le savoir les questions qui allaient changer le cours de l'enquête. Et plus tard précipiter sa vie dans un tourbillon de douleur.
« Vous êtes Irina Woods? »
Un silence. Une hésitation.
« Non »
Excitation. Détermination.
« Vrai. Vous êtes donc Nina Wang? »
Peur. Sueur. Défaite.
« Oui » Le moniteur afficha mécaniquement un battement de coeur raté et la pupille se dilata pendant une seconde. Le jeux étaient faits. Dans la tête de Shizuru des dizaines de questions venaient de surgir, mais elle les repoussa à plus tard avec angoisse.
« Faux. Nina Wang n'est pas votre véritable pseudonyme. »
Lilie Aldean se tordait nerveusement les mains en gigotant sur son siège. « Si... »
« Vous mentez. » Et Lilie Aldean baissa les yeux sans rien trouver à répondre. La femme de Kyoto se leva sans un mot et se dirigea d'un pas pressé vers la sortie. Elle ne se retourna pas. Lorsqu'elle fut certaine de ne plus être observé, elle appuya son front contre le mur et lâcha un juron mental. Mais qu'est-ce que c'est que cette merde?
*
Si l'enquête avait suivi son cours normal, Shizuru et Nao se tiendraient devant la fondation Searrs en ce moment même. Elles auraient traversé le hall d'entrée au pas de course, auraient évincé les gardes du corps qui se seraient mis en travers du chemin et, accompagnées par un escouade de policiers, se seraient engouffrées dans l'ascenseur pour atteindre le bureau de la directrice. Après une intervention qui aurait été musclée et spectaculaire, comme dans les films, elles auraient arrêté la présidente de cette même fondation pour un nombre incalculable de crimes, de la simple entrave à une enquête à la protection d'activités scientifiques hautement illicites. On les aurait félicité. Tout irait pour le mieux.
Dommage que ce ne soit pas un film.
C'était pourtant bien parti. Les pièces s'étaient mises en place très vite et le puzzle reconstitué en quelques minutes pendant lesquelles les deux détectives avaient senti l'excitation se mêler à un farouche désir de vengeance.
Tomoe Marguerite les avait manipulés. Il n'y avait pas d'autre conclusion possible. La présidente de la fondation avait inter-changé les pseudonymes de quatre de ses employés pour protéger les véritables scientifiques responsables du projet Sunrise.
Évident. Tellement évident.
A partir de cette constatation, remonter le fil était un jeu d'enfant. Cela voulait donc dire qu'elle était parfaitement au courant de l'avancement de ce projet. Cela voulait donc dire qu'elle l'avait parrainé, qu'elle avait donné à Nina Wang et Irina Woods des moyens pour son développement. Peut-être même qu'elle l'avait acheté elle-même à la Première Division.
Et cela rendait les deux femmes malades de ne pas avoir vu dans son jeu plus tôt.
Elles devraient donc être en train de l'arrêter. Mais non. La dure réalité s'était rappelé à elles en même temps que les propos de John Smith lorsque leur supérieur leur avait refusé le mandat d'arrêt pour des motifs discutables, tout aussi désolé qu'elles. Les hautes sphères de la police ne sont pas claires. Elles percevaient encore une fois douloureusement à quel point c'était vrai.
Tomoe Marguerite était intouchable.
Il était trop tard.
Les médias avaient déjà désigné les coupables, l'enquête était officiellement terminée.
Elles s'étaient par la suite enfermées dans un silence boudeur et s'étaient réfugiées dans le bureau de Shizuru. Nao fumait présentement sa troisième cigarette en vingt minutes, énervée comme jamais, et tapait du pied sans pouvoir s'arrêter. Shizuru regardait, pensive, le naginata suspendu sur le mur qui lui faisait face. Elle n'arrivait pas à croire qu'elle avait échoué si près du but. Shizuru Fujino gagnait toujours. Toujours. La défaite était insupportable.
Semblant finalement ne plus tenir, la rousse se leva avec raideur et tourna furieusement autour de sa chaise avant de soupirer. Ce fut l'instant que choisit son téléphone pour sonner. Elle sortit souplement l'appareil de sa poche et lut le message avec des yeux toujours aussi furieux avant de se tourner vers Shizuru.
« Mikoto est au restaurant de Mai. Ça te dit d'aller te changer les idées? »
La mine sombre de Shizuru s'éclaira subitement et la jeune femme lui renvoya un sourire rayonnant. Nao cligna des paupières un instant, certaine qu'aux dernières nouvelles, Shizuru n'était jamais si pressée de rencontrer leur amie dont elle disait que l'hyperactivité la fatiguait.
« Euh, Shizuru? » demanda-t-elle, perplexe.
« Désolée, Nao » lui répondit cette dernière, les yeux brillants, « mais je suis attendue. »
Un éclair de compréhension passa dans les yeux de la rousse et cette dernière lui rendit un sourire entendu. « Alors quoi, Kuga s'est enfin décidée à te déclarer sa flamme éternelle et tu es encore là à attendre le déluge? » Shizuru éclata de rire. Un rire frais. Un rire vrai. Tellement différent de ceux qu'elle avait l'habitude d'entendre que Nao se sentit fondre un instant.
« Bah, au moins l'enquête aura servit à ça » reprit la femme araignée avant de sourire plus amèrement. « Ouais. »
Shizuru ne tenta pas de la réconforter. C'était inutile. Elles étaient sans doute toutes les deux trop dégouttées pour cela. Sans un mot, elles se séparèrent et Shizuru conduisit jusque chez elle.
A mesure qu'elle se rapprochait de son appartement, son esprit devenait plus léger et son coeur se mit même à chanter. Natsuki l'attendait. Elles allaient parler. Rien ne lui paraissait plus merveilleux. Pourtant, lorsqu'elle entra dans son appartement, sa bonne humeur se dissipa. Personne n'était dans le salon. Elle fronça les sourcils et posa ses clefs sur un meuble avant d'avancer dans la pièce. Pas de Natsuki.
Et le silence.
Elle tourna la tête vers sa chambre seulement pour constater que les lumières y étaient éteintes, elles aussi. Son coeur battait trop fort et trop vite. Elle laissa tomber son sac et traversa la pièce pour atteindre sa chambre. Pas de Natsuki.
Le silence.
Elle ferma les yeux en sentant son coeur se fendre en deux. Natsuki ne l'avait pas attendue. Elle était partie. Encore.
Et le silence, le silence était insupportable. Elle suffocait.
Comme si elle évoluait à présent dans un bocal, elle chancela vers l'un des fauteuils et s'y laissa tomber. Elle se prit la tête entre les mains et tenta d'arrêter le flot de pensées qui l'assaillaient.
Natsuki l'avait laissée. Pourquoi?
Ce ne fut que lorsqu'elle releva la tête pour parcourir une nouvelle fois la pièce dans un vain espoir de voir apparaître cette longue chevelure d'ében qu'elle aimait tant qu'elle la vit.
La note.
Elle se redressa, la tête pleine d'espoir, et s'empara prestement de la feuille de papier sur laquelle elle devinait l'écriture de Natsuki qui paraissait de façon surprenante fine et harmonieuse. Avec nostalgie, Shizuru repensa à l'écriture brouillonne et hachée que son amie détenait lorsqu'elles étaient au lycée. La louve avait tellement changé.
Quelque chose tomba de la table et capta son regard. C'était une petite carte plastifiée, de la même taille qu'une carte vitale ou qu'une carte de bibliothèque. Un mauvais pressentiment la saisit lorsqu'elle se pencha pour la ramasser, à tel point qu'elle hésita à la prendre quand sa main fut à quelques millimètres d'elle.
Après être restée un moment immobile, elle ramena sa main à elle et préféra lire la note avant de se saisir du morceau de papier plastifié qui gisait sur son tapis. C'était, comme d'habitude, un instinct inexplicable. Elle savait qu'il ne fallait pas prendre la carte.
Ses yeux se posèrent donc sur la lettre avec anxiété tout d'abord puis, au fur et à mesure qu'elle lisait, avec incompréhension.
Shizuru,
Je te dois la vérité. Je te donne rendez-vous. C'est si simple, au fond.
Si tu prends la route 34 vers le nord, tu te retrouveras dans une forêt. Il y aura un croisement. Ignore-le. Au deuxième croisement, prend à gauche et suis la route jusqu'au plus profond des bois. Si tu fais cela, il arrivera un moment où tu longeras la côte. Lorsque tu verras un ancien phare, arrête ta voiture et continue à pieds. Enchâssé contre la falaise, sous le phare, il y a un bâtiment. C'est là que je t'attendrai. Ce soir, dans les sous-sols.
Ne viens pas seule, mais la police ne doit rien savoir. Elle est impliquée.
Je suis si désolée, pardonne-moi.
Il ne reste plus beaucoup de temps.
Choquée, Shizuru se précipita sur la carte qu'elle avait laissé sur le sol et la lut avec avidité. Bien mal lui en prit.
Sur la petite carte aux couleurs de la fondation Searrs, il y avait le portrait de Natsuki Kuga surmonté de son pseudonyme officiel.
Nina Wang.
Shizuru pleura lorsqu'elle comprit.
La vie était une perpétuelle horreur.
*
21 Avril 2014 - 22h12
Il n'y avait que des arbres noirs à perte de vue. La terre était boueuse, les feuilles des arbres brillaient comme des lames à la lueur de la lune. La forêt aurait sans doute été belle si l'atmosphère qui y régnait n'était pas aussi mortelle. Inquiétante. Terrifiante. Au loin, on entendait les bruits étouffés de vagues se ruant contre des falaises et les clapotis paisibles d'un ruisseau.
Mais soudain, quelque part dans cette forêt sombre et inhabitée, le grondement d'un moteur se fit entendre et déchira le silence obscur qui habitait les profondeurs des bois. Les arbres se réveillèrent et regardèrent passer d'un oeil moribond la voiture qui arpentait la seule route qui traversait leur sanctuaire oublié. A l'intérieur, ils distinguèrent quatre silhouettes. Lorsqu'ils les reconnurent, ils semblèrent se courber pour les saluer et se retirèrent pour les laisser passer.
Même la Nature se prosternait devant des Himes.
A l'intérieur de la dite voiture, le silence était pesant. Une femme aux cheveux rouges comme le sang conduisait en fumant nerveusement la énième cigarette de la journée, en ignorant le fait que c'était aussi la dernière de son paquet. A ses côtés, une autre femme dont les yeux dangereux et brillants comme des rubis dardaient la route de regards assassins se tenait raide contre son siège. A l'arrière, deux silhouettes aux visages impénétrables fixaient un point invisible à l'extérieur.
Shizuru, après avoir retrouvé ses moyens et le courage de se lever, avait appelé Nao en urgence et avant que cette dernière n'ai pu protester, sa rouquine d'amie avait décidé de l'accompagner. Seulement, là où allait Mai se trouvait toujours son éternel garde-du-corps, Mikoto Minagi, qui les avait suivies elle aussi jusqu'à l'appartement de la femme de Kyoto. Une fois arrivées là, les deux détectives s'étaient vues dans l'obligation de leur expliquer la situation car il était évident que tant pour Mai que pour Mikoto, le fait de trouver une carte comprenant la photo de Natsuki et un nom étranger associé n'avait pas de sens.
Le sentiment de trahison qui avait envahi les quatre femmes lorsqu'elles avaient fini de tout expliquer en détail avait été pour le moins amer.
La vérité était dure à avaler. Natsuki les avait manipulé d'un bout à l'autre de l'enquête. Elle leur avait donné de fausses pistes, les avait conduit jusqu'aux boucs émissaires pour se protéger. La jeune scientifique était celle qu'elles cherchaient depuis le début et aucune d'entre-elles n'avait rien vu venir. Mais l'heure des explications était venue.
En regardant le visage fermé de Nao alors qu'elle conduisait, Shizuru comprit que la jeune femme ne ferait aucun cadeau à celle en qui elle avait eu toute confiance et qui l'avait trahi. Mai était trop silencieuse pour ne pas paraître dangereuse, et Mikoto serait contre elle le katana qui ne la quittait jamais. Les deux jeunes femmes avaient très mal pris le fait d'avoir été tenu à l'écart d'une telle affaire, et encore plus le fait de ne pas avoir été mises au courant que Natsuki était au Japon, à quelques kilomètres d'elles depuis des mois. Et personne ne pouvait les en blâmer. Shizuru, quant à elle, se sentait vide. Elle ne savait plus rien. Elle avait l'impression d'agir comme un automate.
A l'origine, Nao et Shizuru devaient venir au rendez-vous fixé par leur « amie » seules. Elles ne voulaient pas que leurs amies, qui avaient des vies confortables et stables, se retrouvent dans une situation qui pourrait leur être fatale. Car après tout, aucune d'entre-elles ne savait ce qui allait se passer lorsqu'elle arriveraient au phare. Ni ce qu'elles allaient découvrir. Mais c'était peine perdue. Quand Mai avait quelque chose en tête, mieux valait allait dans son sens. Elles étaient donc parties à quatre. Quatre Himes. Ensemble, comme avant.
Elles tournèrent encore un moment avant d'émerger de la forêt. A l'instant même où elles dépassèrent la lisière des arbres, le phare apparut. Nao coupa le moteur après avoir caché du mieux possible la voiture sur le côté, et Shizuru regarda autour d'elle pour mieux s'imprégner de la force que dégageaient les lieux.
Le panorama était irréel. Dans la nuit et seulement éclairé par une Lune à demi-pleine, le phare surplombait une falaise de roches plus noires que le charbon. Des vagues paisibles s'échouaient contre elle avec langueur avant de repartir vers l'horizon. Une mer miroitante leur faisait face, sublimement mystérieuse, et une brise légère faisait danser leurs cheveux.
Tout n'était que bleu, noir et blanc. C'était une nuit lumineuse.
La femme aux yeux rouges vérifia que son revolver se trouvait bien à sa ceinture et vit Nao faire de même. Du coin de l'oeil, elle vit Mikoto, qui avec l'âge était devenue une grande femme fine et élancée dont la silhouette androgyne pouvait parfois être confondue avec celle d'un homme, ajuster la place de son katana sur ses épaules. Elle se tourna vers Mai et constata que la jeune femme portait à sa ceinture avec décontraction le revolver que Nao lui avait prêté pour l'occasion.
Ses inquiétudes s'envolèrent à la vue de ses deux amies. Mikoto pouvait découper une mouche en morceau avec un sabre et Mai n'était pas n'importe quelle tenancière de restaurant. Elle avait gardé en elle une force sur-humaine lorsque les Himes avaient perdu leurs éléments, et Shizuru savait que la sous-estimer était une grossière erreur. Mai n'était pas juste une Hime. Elle était celle qui avait gagné. Et elle était infiniment plus dangereuse que sa silhouette pulpeuse le laissait présager.
Chacune se sentant rassurée à la vue de ses coéquipières, elles se mirent en marche en silence avec une froide détermination dans le regard. Le phare était évident, mais le bâtiment qu'il surplombait restait désespérément hors de vue, caché dans l'ombre de la falaise. Il leur faudrait avancer encore avant de le voir. Le pouls de Shizuru était dangereusement lent. Le calme froid dont elle faisait preuve à chaque fois qu'elle était en mission l'avait envahi lorsqu'elles avaient commencé à marcher et semblait plus solide que jamais.
Après quelques minutes, le bâtiment recherché leur offrit enfin sa vue et Shizuru admira la façon dont il était camouflé. Enchâssé dans la falaise, on ne voyait de lui que quelques pans de béton et quelques fenêtres qui réfléchissaient la lumière de la lune. De loin, il était impossible de le distinguer des roches qui l'entouraient.
Elles marchèrent en silence encore un moment et s'immobilisèrent finalement lorsqu'elles furent au dessus de leur but. C'était Nao, une fois de plus, qui était la plus heureuse. Elles allaient encore faire de l'escalade et Shizuru grimaça rien qu'à cette pensée.
La rousse ouvrit la marche. Elle balança souplement son corps entre la falaise et le vide et commença à descendre. Mai la suivit, non pas en souplesse mais en force. Shizuru descendit à son tour puis Mikoto ferma la marche avec grâce. Les chats aimaient beaucoup l'escalade, eux aussi.
Lorsque Nao arriva à hauteur d'une fenêtre, elle stoppa sa descente et fit signe à ses coéquipières de faire de même. Le silence n'était bousculé que par le bruit de leurs respirations, contrôlées et signe d'une intense concentration. Ce n'était pas le moment de lâcher prise et de tomber dans le vide. A cette pensée, le corps de Shizuru se tendit et elle voulut regarder vers le bas pour voir ce qui l'attendait si une telle chose se produisait.
Une main impérieuse lui fit relever la tête avant qu'elle ait pu distinguer quoique ce soit et Mikoto la regarda en secouant la tête avec lenteur. Mieux valait ne pas savoir.
Le bruit d'une fenêtre qui s'ouvre la tira de ses pensées sordides et elle comprit que Nao avait réussi à ouvrir la fenêtre. Elle continua de regarder les roches à quelques centimètres de son visage et de se concentrer sur ses prises en se demandant pourquoi Nao n'entrait pas. Elle voulut baisser le regard pour voir ce qu'il en était mais Mikoto la força de nouveau à regarder vers le haut en murmurant posément.
« Si tu regardes vers le bas, tu tomberas. »
Elle hocha la tête et soupira. Il ne lui restait plus qu'à attendre.
De son côté, Nao contemplait, perplexe, l'intérieur de la salle sur laquelle donnait la fenêtre. C'était une salle remplies d'imprimantes rangées les unes à côté des autres. Elle se demanda à quoi pouvaient bien servir autant de machines alors que le bâtiment semblait relativement petit et discret. Elle jeta un oeil autour d'elle et repéra une caméra de surveillance. Avec une brusque inspiration de surprise, elle vit que cette dernière regardait directement vers elle. Prise d'une soudaine panique, elle se demanda depuis combien de temps elle avait été vue et s'apprêta même à faire demi-tour. Et puis quelque chose la frappa.
Toutes les caméras de surveillance possédaient un petit lumignon, vert ou rouge, indiquant son état de marche. Toujours. Nao reposa son regard sur la caméra qui lui faisait face et constata une nouvelle fois ce qu'elle avait vu. Aucune sorte de lumière n'émanait de la caméra.
Elle était éteinte. Complètement hors-service.
Nao faillit éclater de rire à cette vision. Voilà pourquoi aucune alarme n'avait encore retenti. Sans attendre une seconde de plus, elle se faufila dans la salle aux imprimantes et attendit que ses amies se glissent à sa suite.
Lorsque Shizuru entra dans la pièce et qu'elle remarqua elle aussi la caméra, elle lança un regard interrogateur à sa coéquipière qui lui rendit un sourire narquois.
« Éteint. » énonça-t-elle simplement en retenant visiblement un rire. Shizuru sourit elle aussi alors que Mikoto s'engouffrait dans la pièce à sa suite. Ce pourrait-il que Natsuki les ait aidées cette fois? Rien ne lui paraissait plus probable.
Lorsque tout le monde fut prêt à continuer, Shizuru reprit la tête de la petite expédition. Après tout, les intérieurs étaient son domaine. Elle ouvrit la porte prudemment et jeta un oeil dans le couloir où elles avaient atterri. Les lumières étaient éteintes. Le noir était presque impossible à percer.
Avec un soupir, elle avança à l'intérieur du corridor et faillit lâcher un cri de surprise lorsqu'une soudaine lumière l'éblouit. Elle regarda à droite et à gauche en dégainant son revolver à une vitesse hallucinante mais ne vit rien. Elle sentit la présence de ses amies derrière elle et quand elle se retourna, elle vit qu'elles souriaient toutes les trois avec amusement. Elle fronça les sourcils. Il n'y avait pourtant rien de drôle.
Mikoto s'ébouriffa les cheveux, les yeux brillants d'espiéglerie.
La lumière se fit dans son esprit. Des lumières automatiques. Elle aurait dû y penser plus tôt.
Sur la gauche, le couloir débouchait sur un hall. C'est par là qu'elle choisit d'avancer. Les ascenseurs et escaliers se trouvaient toujours dans les halls. Elle sentit la présence réconfortante de ses amies derrière elle et avança à pas prudents. Une nouvelle caméra de surveillance les accueillit et elle constata avec soulagement qu'elle n'était pas non plus en état de marche.
Le hall sur lequel elle débouchèrent était froid. Shizuru devinait qu'elles se trouvaient sous la falaise. Les murs étaient blancs. Pas un seul fauteuil n'était à portée de vue, pas une seule plante ne donnait à la pièce un semblant de vie. L'agent repensa aux impressions qu'elle avait eu lorsqu'elle était entrée à la fondation Searrs quelques jours auparavant et constata que ce hall dégageait au contraire une atmosphère terrifiante. Il y avait une odeur de brûlé étrange dans l'air qui l'alerta.
Tout dans cet endroit semblait respirer le secret et l'inquiétude.
Elle se dirigea vers l'ascenseur, confiante à présent qu'aucune caméra de surveillance n'était en état de les repérer, et appuya sur le bouton d'ouverture des portes comme si elle était un employé des lieux.
Était-ce vraiment dans cet endroit que Natsuki travaillait? Comment pouvait-elle en être arrivée là?
Elle releva son revolver et entendit Nao et Mai dégainer les leurs et faire de même. Le chuintement du métal contre son fourreau lui fit comprendre que Mikoto se tenait prête, elle aussi. Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent. Personne ne s'y trouvait. Elle s'y engouffrèrent et Shizuru appuya sur le bouton le plus bas. Elle n'avait aucune idée de ce que signifiaient les lettres R-7 qui se trouvaient à côté de ce dernier, mais comme la note que lui avait laissé Natsuki lui disait « sous-sols », elle décida que c'était sans doute l'étage le plus bas du laboratoire.
Le silence pendant la descente fut lourd et long. Elle eut l'impression que le trajet vers les profondeurs du monstre dura une éternité. Peut être même plus que cela. Sa mains agrippa un peu plus son arme et elle la leva devant elle, prête à faire feu si un garde venait à leur rencontre.
L'ascenseur s'arrêta et les quatre Himes s'entre-regardèrent anxieusement pendant une seconde avant d'entendre l'ouverture des portes. Comme elles s'y attendaient, c'était un hall. Un hall vide. Petit, sombre et vide. Elles avancèrent en pensant que des lumières automatiques allaient s'allumer sur leur passage mais il n'en fut rien. La pièce restait désespérément dans l'obscurité.
Deux portes éloignées l'une de l'autre se présentèrent à elles. Sur celle de gauche il était écrit les initiales « N.W » et sur l'autre, à droite, « I.W ». Elles étaient arrivées à leur destination.
Shizuru inspira longuement avant de s'avancer vers la porte aux initiales de Nina Wang et s'arrêta au moment où elle posa la main sur la poignée. Ce fut Mai qui, en la poussant avec douceur sur le côté, ouvrit la porte en grand d'un coup sec et décidé.
Le corps de Shizuru se figea lorsqu'elles virent ce que la porte cachait si bien. Son sang gela dans ses veines et ses yeux s'écarquillèrent d'horreur à la vue qui s'offraient à elles.
Une antre de cauchemar. |
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