Voilà, je me fais une petite page où poster mes quelques créations...
J'ai commencé ce qui suit au début de l'année.
Au départ, je ne voulais pas le poster avant d'avoir trouvé un titre digne de ce nom, mais ma foi, les mois ont passé et je n'ai toujours rien trouvé, alors voilà :
Ma petite fanfic sans titre ^^" :
Partie 1
Assise au coin du feu, une tasse de thé à la main, Shizuru tentait d’échapper à l’agitation générale caractéristique de leurs débuts de soirées. Elle s’installait le plus souvent ainsi, près des flammes, s’adonnant à la lecture, après s’être éclipsée de la salle à manger de la résidence privée des Kanzaki.
Une dizaine de jours s’étaient écoulés après qu’ils aient tous accepté l’invitation de Reito. Les combats finis et le monde hors de danger, les choses reprenaient lentement leur cours. Désormais en vacances d’été, Reito s’était alors proposé de recevoir le petit groupe dans sa demeure, afin de profiter de ces beaux jours bien mérités. Il avait au départ l’intention de n’inviter que sa jeune sœur Mikoto récemment retrouvée, mais bien évidemment, il eut été cruel de la séparer de Mai. S’étaient ajoutés à la liste des convives Takumi, Tate, Akira, Shizuru et Natsuki ainsi que quelques amis d’école qui les rejoignaient pour la journée.
Ayant noté la fuite de son amie, Reito l’avait rejointe au petit salon. Tandis qu’il s’approchait d’elle, il laissa échapper un soupir en la trouvant plongée, recluse dans son univers, ne prêtant aucunement attention à son entourage. « Belle… mais seule » ne put-il s’empêcher de penser.
- « Natsuki ! » souffla t-il à voix basse.
Shizuru se retourna alors, immergeant instantanément de sa lecture et aperçut Reito. Elle esquissa alors un petit sourire de s’être laissée prendre une fois de plus à la plaisanterie de son fuku-kaichō.
- « Ne m’en veux pas !! Mais c’était de loin la meilleure méthode pour attirer ton attention. »
En s’asseyant à ses côtés, il jeta un coup d’œil furtif au décolleté de sa supérieure. Elle portait son yukata de nuit rose, celui qu’elle portait sous les épaules révélant ainsi le creux de sa poitrine. Elle dégageait tant de féminité. « Mmm, Kuga-san no baka ! Elle ne sait vraiment pas ce qu’elle rate” se permit-il de penser.
- « Il pleure dans mon cœur comme il pleut sur la ville, quelle est cette langueur qui pénètre mon cœur ? …Il pleure sans raison dans ce cœur qui s’écœure… »
Tandis qu’il récitait les quelques vers qu’il connaissait, la présidente du Conseil de Discipline se retourna avec curiosité vers son subordonné, marquant d’un sombre sourire son acquiescement.
- « Je le l’aurais pas mieux dit… Je te savais clairvoyant, un tantinet poétique… »
- « Shizuru… »
- « Mmm… »
- « Nous avons accomplit de grandes choses en travaillant ensembles. Rien ne nous a jamais parut insurmontable, rien ne nous a jamais résisté. Alors, pour une fois… »
Reito releva la tête vers Shizuru. Non, elle ne demandait pas d’aide, elle faisait face à sa souffrance avec dignité.
Sans en connaître les détails, il savait que quelque chose s’était passé entre elle et Kuga Natsuki. A la soirée karaoké de Mai, la présidente ne s’était jamais montrée aussi spontanée et ouverte envers Kuga-san. Elle s’était autorisée à rester accrochée à son cou la soirée durant, ceci aux yeux de tous. Le saké coulant à flots, personne n’y avait vraiment prêté attention si ce n’était Kanzaki-san lui-même.
Aux côtés de Shizuru depuis de nombreuses années, en tant que camarade de classe ensuite en tant que fuku-kaichō, il lui avait été possible de noter l’attention toute particulière qu’elle vouait à cette jeune élève introvertie, asociale et peu respectueuse du règlement. Ne comptant jamais ses heures, elle n’avait jamais manqué de disponibilité pour lui dispenser des cours de soutien ou tout au moins pour la recevoir quand elle s’était faite expulser des cours. Reito avait encore en mémoire la ferveur avec laquelle Shizuru, qui n’appartenait pas encore au Conseil, avait plaidé contre le renvoi définitif de sa protégée. Il n’avait pas manqué l’excès de bonne humeur qui la gagnait soudain quand la jeune fille était dans les parages, ces petites allusions qu’elle lui soufflait…
Il s’était dit ce soir-là que sa présidente s’était enfin décidée à ouvrir son cœur. Il constata simplement que la situation n’avait pas prit la tournure positive à laquelle ils s’attendaient tout deux. Depuis, on n’avait revu Natsuki à la salle du Conseil et Shizuru avait perdu, semblait-il, la capacité physique de sourire. « Elle s’est faite rejetée » Reito avait-il conclu.
- « Que dirais-tu de me laisser faire pour une fois ? » lui demanda t-il en se levant.
Il lui tendit la main et l’aida à se relever. Mikoto les aperçut au moment où ils quittaient la pièce.
- « Ani-ue … »
- « Mmm ? Qu’est-ce qu’il se passe avec Ani-ue ? » Demanda Tate en se penchant vers elle.
- « Il est sortit … en tenant la main du Kaichō-sama … »
Prenant joyeusement Mikoto dans ses bras, il lui souffla à l’oreille :
- « Ne t’inquiète pas Ani-ue a enfin trouvé l’amour, tu n’auras plus à craindre qu’il te vole ta Mai adorée !! »
** Et moi non plus ** continua t-il pour lui-même pleurant intérieurement, de joie bien sûr.
- « Qui a trouvé l’amour ? » demanda alors Akira de son air suspicieux, avant d’attraper Tate par le cou.
- « Ce... ce n’est rien… » à bout de souffle « ce sont juste nos kaichō »
- « Heiinnn !! Reito-san et Kaichō-san ? Hé hé !! »
Maï se retourna alors vers une certaine personne d’une perpétuelle mauvaise humeur, et ajouta :
- « Maintenant que tout le monde est casé, tu voudrais peut-être que l’on t’arrange quelque chose avec Takeda-sempaï par exemple ? »
- « Heinnn !! Ba… BAKA !! » Lui répondit Natsuki rouge de colère. « Si c’est pour entendre ce genre d’idioties, je préfère aller faire un tour … » ajouta-t-elle en enfilant un blouson.
Elle attrapa son casque et se dirigea vers l’extérieur de la maison, là où était garée sa nouvelle moto : une Suzuki Hayabusa GSX1300R . Mai la suivit du regard sans comprendre sa réaction. Tate prit alors un air sérieux.
- « Maintenant que j’y pense, j’ai bien souvent pensé que si Kuga-san pouvait aimer quelqu’un, ce ne serait surement pas Takeda-sempai ** Gomen sempaï ** mais plutôt… Fujino-kaichō. »
- « Heiinnn ?! Kaichō-san !!?
Elle se souvint alors de la discussion qu’elle avait eu avec Natsuki quelques mois auparavant, le soir où elles et Mikoto avaient pénétré dans un ancien laboratoire du Premier District. A l’époque, Mai, constatant que Natsuki ne s’intéressait pas aux garçons, elle avait commencé à penser « d’autres choses » à son sujet. Elle fit alors le rapprochement avec l’ultime combat de Natsuki, avant la destruction de l’Etoile des HiME.
- « Natsuki et Kaichō-san ont toutes deux perdu la vie de s’être battue l’une contre l’autre… » Puis continuant son raisonnement « L’une était l’être cher de l’autre… forcément …»
Le rouge lui monta aux joues à cette idée.
- « Ca m’a l’air bien compliqué tout cela » ajouta t-elle simplement, à l’intention de Tate.
Elle ne pouvait s’empêcher de comprendre Natsuki. Pour l’avoir vécu elle-même, elle ne savait que trop bien à quel point il était difficile de voir clair en son propre cœur. Elle se tourna vers Takumi, Tate et Mikoto.
** Il m’aura fallu tout perdre, tout … pour y parvenir ** se dit-elle en les observant, les larmes aux yeux.
Tandis que leur absence faisait tapage dans la salle à manger, Reito conduisait silencieusement son amie vers une salle excentrée du reste de la demeure.
-« C’est sûrement la pièce que je préfère dans cette maison, celle qui me terrifie aussi. » expliqua-t-il au seuil de la porte.
Il pénétra dans la pièce avec aise malgré l’obscurité. Il disparut quelques instants, puis, à mesure que s’allumaient des chandeliers, Shizuru put découvrir qu’il s’agissait en fait d’une salle d’entraînement dont les murs étaient ornés d’armes de toutes sortes, plus belles les unes que les autres : des katanas de différentes tailles, des wakizashis, des tantos, des lances, des nunchakus et autres sai, tonfas, nagigata...
- « Comme tu le sais, la raison même de notre existence, Mikoto et moi, était de lutter et tuer. Nous avons été élevé dans ce sens … aussi, le maniement de chacune de ses armes m’est très familier. Cette salle a toujours été ici, ce n’est pourtant qu’après les combats que j’ai été capable de m’en souvenir et d’y revenir. Mes démons sont dans l’air même de cette pièce. »
Les yeux fermés, il esquissa un petit sourire.
- « Maintenant, que tout est terminé, je peux enfin considérer les choses différemment, essayer tout au moins… »
Se tournant vers Shizuru, il lui prit son livre des mains et lui tendit à la place une hallebarde à la lame non aiguisée, en vue d’un petit entraînement.
- « Un peu d’exercice te convient-il pour ce soir ? Ainsi tu pourras regagner ton lit et trouver le sommeil sans avoir la force de penser ni de déprimer… En tant qu’HiME, tu maniais une hallebarde, tu ne devrais pas te sentir dépaysée. » Ajouta-t-il attentionné.
La présidente accepta l’arme et l’intention mais se dirigea vers le jardin.
- « Allons plutôt dehors… je n’aime guère plus les démons. »
Kanzaki-san attrapa plusieurs chandeliers qu’il disposa autour d’eux afin d’y voir un minimum. Shizuru se débarrassa de sa robe de chambre de façon à être plus libre de ses mouvements puis elle prit position en face de son partenaire. Elle esquissa alors un sourire, appelant la confrontation.
Ils échangèrent quelques coups, chacun reprenant ses marques. Les échanges se firent alors de plus en plus rapides, précis, violents et … dangereux. Shizuru avait le dessus, plus légère, plus vive que Reito qui n’avait plus sa dextérité d’enfance ni celle de Kokuyou no Kimi. Malgré tout, il gardait le rythme, suffisamment pour permettre à sa partenaire de s’épanouir dans l’échange. Sa technique était assurément remarquable, élégante, gracieuse et efficace tout à la fois. Elle lui tenait tête malgré son arme bien trop lourde pour un tel corps à corps. Elle semblait danser sous les étoiles.
**Qu’est ce que cela doit donner au sabre ou à l’épée ? ** se demanda t-il heureux de pouvoir partager le fardeau que représentait ces armes avec celle qu’il considérait comme sa meilleure amie.
** Si je pouvais faire pour toi ne serait-ce que le quart de ce que tu as fait pour moi...**
Il esquiva alors une attaque et attrapa Shizuru. Laissant tomber son arme à terre, il l’enlaça par derrière.
- « Reito… »
Confuse dans l’instant, elle comprit alors…
Elle lui tapota le bras et lui dit d’une voix calme :
- « Tu me comprends mieux que personne… Ne t’inquiète pas, j’ai simplement besoin de temps, pour me remettre … et me pardonner à moi-même »
- « Hai ! Wakarimashita Kaichō-sama » ajouta-t-il d’un ton joueur.
Shizuru le suivit et rit de bon cœur.
De l’autre côté du jardin, Natsuki, qui revenait de sa balade, assistait à la scène, ne comprenant que ce qu’il y avait à voir.
** Pourquoi a-t-il fallu que je revienne cinq minutes trop tôt… ? Vaut mieux être aveugle que de voir ça…** se dit-elle en colère, tout autant qu’avant sa promenade.
Sans un mot, elle regagna la chambre qu’elle occupait dans la résidence Kanzaki. En ouvrant la porte, ses yeux tombèrent sur les affaires de Shizuru.
Un tirage au sort qui lui avait semblé des plus truqués avait désigné les occupants d’une même chambre. Le « hasard », ainsi qu’on l’appelle, l’avait placé avec la personne la plus chère à son cœur : sa meilleure amie, cette amie qui lui avait tendu la main pendant ses années d’égarement, cette même amie qui lui avait volé un baiser, partagé son lit et sa nudité à sa propre insu.
Le malaise de Natsuki dépassait l’évidence. Il lui arrivait de se réveiller la nuit en sursaut, l’image du baiser de Shizuru en tête, vérifiant alors que sa compagne était bien dans son propre lit et non dans le sien. Elle se sentait coupable de soupçonner ainsi celle à qui elle devait son salut, mais rien n’y faisait, son insécurité avait le dessus. La présidente n’était pas dupe, elle savait parfaitement que partager cette même chambre rendait mal à l’aise sa partenaire.
Pourtant cette fois, en voyant les affaires de la présidente, sur le lit à côté du sien, la culpabilité était bien loin, seul ce sentiment oppressant… de la colère et mille autres choses inexplicables. Mais cette colère tout au moins, qu’elle connaissait si bien, lui piquait la poitrine, lui murmurant sournoisement à l’oreille « Laisse-toi aller… prend ses affaires et vire les dans le couloir, mieux, devant la porte de ce fichu Kanzaki et demain, tu t’en vas pour ne jamais revenir…» Natsuki s’avança près du lit et attrapa la première chose qu’elle eût sous la main puis elle se ressaisie.
** Pssff ... quelle idiote… je ne suis plus une enfant... **
Elle prit sa trousse de toilette et se dirigea vers la salle de bain, avant qu’une autre idée saugrenue ne lui vienne.
Une fois sous la douche, elle espérait pouvoir se reprendre…
A la vue de ce corps qui était le sien, elle eut, comme à chaque fois depuis, la vision de Shizuru qui s’allongeait contre elle, l’image d’avant aussi. Elle aurait voulu changer de peau. A défaut de le pouvoir, elle avait multiplié les douches, mais rien n’y faisait. Le malaise lui collait à la peau, au sens propre comme au figuré. Les poings serrés, appuyée contre les parois de la douche, l’eau s’écoulant, elle maudissait celle qu’elle jugeait responsable de son état.
** Pour ce que j’ai vu ce soir, Shizuru, pour m’avoir volé mon premier baiser, pour… pour –elle avait peine à le dire – avoir abusé de moi… je te déteste, je te déteste. Tu m’as tiré de la solitude pour mieux me conduire à la folie !! C’est de ta faute, Shizuru !! Comment… as-tu pu ?!! A cause de toi, je ne me sens plus chez moi dans mon propre corps… **
Elle avait les mains posées sur ce qui lui paraissait désormais étranger.
** C’est comme si… ce corps… mon corps …lui appartenait maintenant… ** s’avoua-t-elle en suffoquant.
Elle finit par interrompre sa douche qui manifestement aggravait davantage son humeur qu’autre chose. Toujours aussi furieuse, elle regagna sa chambre et se mit au lit, tirant les couvertures au-dessus de sa tête. Les yeux ouverts, les yeux fermés, les mêmes images lui revenaient, sans cesse.
Elle sursauta en entendant soudain s’abaisser la poignée et la porte s’ouvrir. Shizuru pénétra dans la pièce en silence. Elle se dirigea vers la table de chevet entre leurs deux lits et alluma la petite veilleuse. Elle se tourna vers Natsuki dont les mèches de cheveux dépassaient des draps.
** A s’endormir ainsi en colère, elle finira par s’asphyxier ** se dit-elle amusée. ** A moins qu’elle ne s’asphyxie de colère**
La seconde idée lui paraissant fortement réalisable, elle ne put se retenir et un petit rire se fit entendre dans la pièce.
** Que peut-il y avoir de si drôle ? ** se demanda celle qui faisait semblant de dormir.
Shizuru fit alors le tour du lit.
** Tu apprendras à tes dépens que simuler te réussit moins qu’à moi… ** pensa t-elle, se réjouissant silencieusement de ce qu’elle s’apprêtait à faire.
Elle s’agenouilla à la hauteur de la tête de sa princesse endormie puis tira délicatement le drap et lui découvrit le visage. Les yeux fermés, Natsuki retenait sa respiration. Elle n’en revenait pas.
** Non ! Pas une deuxième fois !! **
-« Natsuki… » Murmura-t-elle d’une voix langoureuse.
Shizuru se laissa aller à lui caresser le visage.
- « Quel angélique…adorable… petit visage … Qui pourrait penser qu’il cache un tel caractère ? »
Elle continua en s’approchant :
- « Natsuki… je t’aime… »
Sentant la respiration de Shizuru sur son visage, Natsuki perdit son sang-froid, poussa un cri et fit un bond désespéré hors de son lit, retombant bruyamment sur le sol. La présidente arbora un sourire victorieux et s’assit au coin du lit. Se tournant vers son amie effrayée, elle ajouta :
- « Ne t’inquiète donc pas, j’attendrais que tu sois réellement endormie pour pouvoir t’embrasser. Tu devrais le savoir, non ? »
Non, c’était plus qu’elle ne pouvait supporter.
** Quelle sans gêne ! Oser porter en dérision ce pourquoi elle devrait se sentir … coupable ou gênée, repentante ! Enfin quelque chose quoi ! **
Voyant le visage de sa douce rougir de colère, Shizuru se leva prestement et quitta la pièce avant que l’orage n’éclate. Elle glissa la tête à travers l’ouverture de la porte et adressa à Natsuki une dernière petite phrase piquante :
- « Tache de te calmer et de retrouver ton visage angélique pendant que je me douche !»
Elle lui fit un petit clin d’œil et referma la porte en vitesse.
** C’est vraiment trop facile ** pensa la présidente sous la douche.
Son sourire avait disparu pourtant. Elle était consciente que les réactions de sa camarade étaient plus que justifiées.
** J’ai abusé de sa confiance, j’ai forcé son intimité… **
Elle s’étonnait elle-même de parvenir à si bien dissimuler son malaise. Il y avait le baiser mais surtout… Elle se revoyait abandonner son kimono pour mieux s’allonger près de celle qui lui faisait confiance, profitant de son sommeil et de sa vulnérabilité.
** Qu’est-ce qui m’a prit ? Comment ai-je pu faire une telle chose ? Accablante, accablante… accablante jeunesse ** pensa-t-elle avec violence, s’enfonçant les ongles dans la peau.
« Vous n’êtes pas les coupables, mais cette ombre qui se cache dans votre cœur... » Les paroles de Sœur Yukariko lui revenait en mémoire.
** Cette ombre que j’ai au fond du cœur…** pensa-t-elle avec un sourire sadique
** … elle fait partie intégrante de ma personne… cette ombre n’est personne d’autre que moi…**
Effrayée d’abord par cette soudaine prise de conscience, elle se sentit régurgiter, écœurée par sa propre personne. Mais rien ne sortit, l’infamie semblait se confondre avec ses entrailles, enracinée au plus profond d’elle-même, impossible à rejeter.
** Je suis la preuve vivante que la honte ne tue pas… Et pourtant… si seulement … **
Comme par télépathie, Natsuki, le visage enfoui dans son oreiller, prête à étouffer, continua la pensée de celle qui se douchait.
** Si seulement j’étais morte à cet instant, je n’aurais pas à vivre avec ceci, je n’aurais pas faire souffrir la seule personne que j’ai jamais aimé. Tout aurait été si simple si tout s’était arrêté à cet instant…**
Il lui revint en mémoire le deuxième acte le plus important de sa vie : à genoux dans l’église, elle avait posé la main sur l’épaule de Shizuru, dégageant ses mèches de cheveux, puis elle lui avait posé un baiser sur les lèvres… « Je ne peux pas avoir les sentiments que tu aimerais que j’ai, mais je t’aime Shizuru… » Elle avait ensuite dit adieu à Duran et à la vie elle-même dans les bras de celle qu’elle aimait plus que tout. Celle pour qui son Child, en écho à ses sentiments, était devenu si énorme, si puissant qu’elle avait encore du mal à réaliser…
** J’étais morte, j’étais morte ** étouffa-t-elle dans un sanglot, honteuse de son ingratitude envers celle qui les avaient tous réssuscité, celle qui leurs avait offert une seconde vie, une seconde chance d’être sincère, envers eux-mêmes et envers les autres.
Ne sachant plus que faire, perdant tout contrôle, elle se précipita dans la salle de bain. A genoux sous la douche, Shizuru se releva instantanément et aperçut à travers le rideau une Natsuki comme elle ne l’avait pas vu depuis des lustres. Tremblante de colère ? elle lui hurla à travers ses larmes :
- « C’est de ta faute !! Tout est de ta faute !! ».
Puis d’un coup elle s’arrêta adossée au mur, face à Shizuru, le regard horrifié, comme si le diable en personne se trouvait là debout, sa fourche en main. Il fallait s’y attendre… elle était sous la douche, non ? A la vue de ce corps qui l’avait déjà bien plus qu’effleuré, elle resta proscrite, pétrifiée. Shizuru attrapa son peignoir et l’enfila, ne sachant que faire, à quoi s’attendre si elle sortait.
A l’étage inférieur, tout le petit monde avait pu entendre les hurlements de Natsuki. Akira renifla avant d’ajouter :
- « Hum ! Il y a des fois où moi et ma présence, on aimerait mieux se trouver un peu plus loin. »
- « Oui, cette belle histoire qui me met la larme à l’œil « Occupons-nous de nos affaires » » ajouta Mai.
Elle se leva du tapis en face de la cheminée et se dirigea vers l’autre salon, celui qui ne donnait pas sur l’escalier. Les autres la suivirent tout aussi gênés d’être les témoins auditifs d’une scène de ménage. Reito jeta un coup d’œil vers l’étage, soucieux.
« Espérons que cela ne soit pas trop grave… »
- « Je peux sortir ? » demanda calmement Shizuru.
N’ayant pas de réponse, elle s’exécuta lentement. Elle s’accroupit, essayant de capter l’attention de Natsuki qui s’était laissée glisser à terre.
- « Va m’attendre dans la chambre, le temps que je m’habille. »
Elle lui ouvrit la porte et la laissa sortir. Elle s’habilla à toute vitesse, craignant que Natsuki ne se sauve.
Shizuru, de par son âge et sa nature était quelqu’un de mesuré et réfléchi. Elle avait cette qualité que de pouvoir restait sereine presque impassible dans les situations les plus diverses. Tandis que tout le monde cédait à la panique, servant ainsi de contrebalance, elle savait conserver son calme et son sang-froid.
Dans la chambre, Natsuki commençait, en plus du reste, à se sentir ridicule de s’être emportée de la sorte. Shizuru allait revenir et il lui faudrait s’expliquer. Mais expliquer quoi ? Qu’elle avait perdu le sommeil depuis l’incident à la maison de thé ? Qu’elle nageait dans la confusion et qu’elle aurait préféré mourir plutôt que d’avoir à tirer au clair tous ces sentiments qui la tiraillaient ? Qu’elle restait mortifiée de l’avoir vu dans les bras de Kanzaki ? Elle en avait le droit après tout. N’était-ce pas là ce qu’il pouvait arriver de mieux ?
Elle se retrouvait là à sangloter bêtement, assise à terre dans un coin de la chambre, la tête cachée entre ses genoux. C’était comme si les toutes ces dernières années n’avaient jamais existé. Elle se retrouvait l’esprit fracturé tel mille pièces de puzzle avec au fond du cœur cette même colère qui la consumait à ses années collège. Shizuru amoureuse d’elle, l’équilibre s’était rompu. Elle avait perdu celle qui l’apaisait, celle qui soulageait son cœur troublé. Elle se retrouvait telle qu’elle avait été des années auparavant : une petite fille effarouchée.
Shizuru découvrit son amie ainsi, de retour dans leur chambre. Elle resta immobile un instant, observant l’image qu’elle avait sous les yeux : une image à l’antipode de celle que quiconque pourrait avoir de Natsuki, à l’antipode de celle qu’elle-même avait eu sous les yeux quelques mois plus tôt : une Natsuki forte et déterminée qui la protégeait de son étreinte, affrontant sans peur l’épreuve de la mort.
La présidente s’approcha d’elle sans appréhension réelle. Elle semblait parfaitement savoir où poser les pieds sur ce terrain miné qu’était le cœur de son amie. Shizuru le savait, elle était à peu près la seule personne à la connaître et comprendre mais surtout la seule et l’unique pour qui Natsuki avait consentit à ouvrir une petite brèche dans sa bulle imperméable au reste du monde.
La présidente se mordit la lèvre, jusqu’à sentir un léger goût de sang.
** C’est de ma faute... entièrement de ma faute… J’étais son amie, la seule sur qui elle acceptait de se reposer un peu. Mais j’ai toujours été amoureuse d’elle... Cette confiance que j’ai mis si longtemps à gagner… On arrivait enfin à communiquer… j’ai… tout… gâché. Je lui ai repris tout ce que je lui avais offert et qu’elle avait finit par accepter… Maudits soit mon cœur et mes sentiments déviants. Mes faiblesses nous perdrons toutes les deux… **
Elle s’approcha de Natsuki avec la juste réserve qu’elle savait nécessaire. Elle s’agenouilla à sa hauteur et lui releva le visage. Elle tira alors de sa poche un joli mouchoir brodé et essuya ses larmes. Ce regard que son amie lui adressa, elle l’avait vu mille fois. Elle le savait parfaitement. Avec Natsuki, les choses fonctionnaient ainsi. Il fallait toujours, toujours négocier et réajuster, la distance entre elles variait constamment, la distance de demain ne serait pas celle d’aujourd’hui. Tous ces millimètres que la présidente avait durement et longuement gagné, elle les avait déjà à moitié perdu quand sa cadette eut découvert ses pouvoirs d’HiME. Du jour au lendemain, Natsuki s’éloigna de Shizuru dont elle était si proche et dont elle avait tant besoin, pour … la protéger. Elle décida ce jour-là d’enfouir son cœur d’enfant sous sa combinaison et partit en guerre contre le Premier District. Pourtant, malgré les apparences, l’enfant au regard effarouché était toujours là, faisant de rares apparitions et sous les yeux d’une seule : Shizuru. Aussi la présidente était celle qui essuyait toutes les tempêtes. Ce soir-là était l’une d’elles.
Lui ayant séché ses larmes, Shizuru garda entre ses mains le visage de Natsuki, ses yeux plongés dans les siens.
** De la confusion, de la tristesse et de la colère...** se dit-elle en lisant dans le regard de sa douce. ** A l’époque, te prendre dans mes bras aurait suffit à te calmer, mais aujourd’hui, je suis la cause de tout cela… Mon amour est criminel… Ce que je t’ai fait est…criminel. Criminel mais réel. Définitivement…**
- « Natsuki … »
- « Je … ne veux rien entendre, je ne veux rien savoir. »
Profitant de sa position, Natsuki se laissa glisser et tomba l’espace d’une seconde dans les bras de Shizuru, puis, avant que celle-ci n’ait le temps de refermer les bras, elle se redressa et prit la direction de son lit, sans un regard vers son amie encore agenouillée. De sous ses couvertures, elle dit froidement :
- « Je … vais dormir »
La présidente s’y attendait, à dire vrai. Discuter à chaud n’était pas le propre de sa jeune amie, discuter tout court, en fait. Elle avait préféré éviter toute discussion et se réfugier dans le sommeil.
** Elle n’a pas tort, après tout. Qu’y a-t-il à dire ? **
Elle se servit une tasse de thé avant d’éteindre la lumière puis, se dirigea à la fenêtre. Les yeux dans le vague, elle resta ainsi, debout, bien longtemps après qu’elle eût vidé sa tasse. Une lourde larme finit par rouler le long de sa joue.
** Je pensais avoir une certaine maturité… Quel regard ingénu je portais sur la vie… Comment ai-je pu le croire si longtemps… Je n’avais jamais imaginé qu’aimer pouvait faire si mal… **
« Quand je ne pouvais plus croire en personne, tu fus la première à venir à moi. Je ne peux pas avoir les sentiments que tu aimerais que j’aie. Je suis heureuse que tu m’aies aimée. Je t’aime Shizuru. »
** « Il est une raison pour toute chose. » pourtant… quel sens donner à une seconde vie alors que je pouvais mourir de la plus belle façon qui soit… Je suis misérable de penser ainsi mais, à défaut d’être morte auprès de toi, me voici à revivre loin de tes bras. Ces sentiments sont un fardeau… pour nous deux… Seigneur, pourquoi ? **
« Je suis heureuse que tu m’aies aimée. » « Je suis heureuse que tu m’aies aimée. »
** Ce que l’on dit avant de mourir est empreint de vérité… Natsuki, tu en étais réellement heureuse ? Natsuki… Il n’y a que le temps qui puisse refermer ce genre de blessure, alors faites que le temps passe, que les heures se transforment en années que cette plaie cesse de saigner. **
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Voilà, c'est fini ^^ _________________ "Who prays for Satan? Who, in eighteen centuries, has had the common humanity to pray for the one sinner that needed it most ?" — Mark Twain
Dernière édition par Kohei le Sam Juin 24, 2006 3:44 am; édité 1 fois |